Rêver d’une autre Haiti

Si, en cette fin d’année, il m’était permis de rêver d’une meilleure Haïti, je rêverais d’un pays sans Jovenel Moïse à la tête de l’exécutif bicephale et la clique de malfaisants pivotant autour du pouvoir; un pays sans Moise Jean-Charles, comme porte-parole de l’opposition et ses démagogues qui utilisent un faux nationalisme pour paravent; un pays sans ces politiciens traditionnels véreux.

Je rêverais d’un pays avec, à sa tête, des hommes courageux aux fibres patriotiques dépourvues d’élasticité, capables de dire NON à l’étranger et aux représentants de ses institutions.

Je rêverais d’un pays avec une armée forte et patriotique commandée par des officiers ayant le sens du devoir qui priment au-dessus tout, l’honneur et le bon renom de cet héritage legué par Jean-Jacques Dessalines; un pays avec une force de police apolitique, protectrice des biens et des hommes, servante de la patrie commune.

Je rêverais d’un peuple qui se réveille finalement de sa longue torpeur et qui se rend compte combien il a été la grande victime de toutes les mascarades politiques, des chicaneries des hommes et femmes au pouvoir, des élites corrompues capables de vendre leur dignité pour quelques dollars et un visa, et qui créent autour de ce peuple des pièges sociaux et financiers avec l’aide des communautés internationales qui s’en fichent bien de sa condition.

Je rêverais d’une jeunesse dynamique qui ignore, sans trop d’arrogance, des aînés dont les actes amoraux ont érodé la société, pour se prendre en charge et qui, munis d’outils éducatifs et professionnels adéquats au développement du pays, regardent l’avenir avec optimisme.

Je rêverais d’un pays propre, sans ces montagnes de détritus à chaque coin de rue.

Je rêverais d’un pays où l’on respecte la vie des autres, où les gangs des quartiers populaires disparaîtraient faute de commanditaires, de fournisseurs d’armes ou contemplant alors de meilleures perspectives d’avenir;  un pays où l’on n’aura plus peur de sortir, et où vaquer à ses occupations en dehors de chez soi ne serait plus une dangereuse aventure.

Enfin je rêverais d’un pays où il fait bon de vivre ou d’y revenir, ne serait-ce que pour passer des vacances, ou pour se ressourcer.

Et dire qu’il suffirait d’un peu de bonne volonté pour avoir un tel pays. Il suffirait de prendre la peine de s’écouter, de dialoguer, de travailler ensemble sur des projets communs de développement sans attendre l’aval de l’étranger.

Si, en cette fin d’année, il m’était permis de rêver d’une meilleure Haïti? Non, il faut que je reste réaliste même quand mon cortex pariétal et frontal, responsable de mon esprit critique, est désactivé pendant mon sommeil. Je refuse à toute heure de franchir les limites du champ du réel, surtout en cette période où certaines féeries ne semblent plus déranger les gens considérés autrefois bien “équilibrés” et certains analystes politiques.

Alors, j’observe et prends note.

J.A.