« Osons espérer » : Voeux pour l’Année 2020

Nous sommes à la fin de l’année 2019, la dernière de la deuxième décade du XXIè siècle…

Durant ces vingt dernières années, nous avons vécu de grandes catastrophes naturels (tremblement de terre, cyclones, inondations). Nous avons essuyé d’énervantes déceptions (la prise du pouvoir en Haiti et ailleurs par des incompétents, la virtuelle occupation d’Haiti par des soldats qui nous ont laissé le choléra, ont profité de la vulnérablité économique de jeunes femmes, et ont abandonné, à leur départ, des centaines d’enfants). À l’extérieur, nous avons observé l’effritement de grandes idées sociales, politiques et scientifiques avec :

  • L’étalage éhonté de visqueux comportements racistes qu’on pensait dépassés;
  • la dévalorisation de la démocratie avec l’inquiétante apparition d’un autoritarisme non point larvé dans des pays aux traditions démocratiques éprouvées;
  • la remise en question de la cause, voire de l’existence du rechauffement climatique, etc.

… Et nous accueillons une nouvelle année, l’an de grâce 2020.

Chaque année, pendant ces vingt années, nous avons pris l’habitude, à pareille époque, de faire une halte pour faire le bilan de l’année qui s’achève et contempler les perspectives d’avenir pour Haïti. Nous nous sommes fait également un devoir de manifester nos gratitudes à tous ceux et celles qui nous ont soutenus, aidés et encouragés pendant les douze derniers mois et surtout d’adresser nos souhaits aux compatriotes de toutes les latitudes.

Cette année encore, nous ne voulons pas nous dérober à cette tradition. Mais la tâche s’avère plutôt ardue considérant les dfficultés que la majorité de nos compatriotes Haitiens ont dû affronter à un degré ou à un autre pendant l’année qui s’achève.

Dans la diaspora, à côté de compatriotes qui peuvent s’ennorgueillir de leur succès et de leur relative propérité dans leurs pays d’accueil,  des Haitiens sont traqués, expulsés ou assassinés en République Dominicaine. Des milliers vivent aux Etats-Unis avec, sur la tête, une épée de Damoclès appelée TPS . À Bahamas et dans les Petites Antilles, ils portent, pour la plupart, les stigmates du mépris des locaux.

En Haiti, ils ont vécu douze mois de manifestations politiques et de troubles sociaux. lls ont assisté à une généralisation de la violence avec des assassinats, des prises d’otages, des viols de femmes et de jeunes adolescentes. lls ont été pratiquement, pendant de longues périodes, pris en otage chez eux, par un gouvernement soutenu par des puissants de la communauté internationale et des groupes et individus se réclamant de l’opposition. Ils ont subi ce que les commentateurs politiques et les directeurs d’opinions ont appelé « pays lock ».

Les enfants, les étudiants ont été les grandes victimes de cette situation dangereuse qui interrompit leur éducation pendant près de trois mois. Tout un trimestre perdu et ce, sans les résultats espérés par les promoteurs du pays lock! En fait, on demandait à grands cris le départ du président Jovenel Moïse, et il est encore au pouvoir au moment d’écrire ce texte, quoique assisté d’un cabinet démissionnaire depuis le mois de mars 2019 et un échec au parlement suite à la nomination de ses deux premiers ministres.

Devant ce constat, nous serions tentés de nous laisser aller au désespoir. Certains ont peut-être déjà adopté ce comportement et planifient définitivement leur avenir en dehors du pays. Mais la vie, ce bien précieux, que nous jouissons en ce moment, ce coin de terre, héritage de nos ancêtres sur lequel luit chaque jour l’astre de purification et de vie, nous commandent à ne pas nous laisser aller au découragement, de penser que le pays peut encore sortir du bourbier et surtout d’espérer. Certains diront « Espérer contre toute Espérance! ».

Soit! Osons donc espérer!

  • En regardant avec optimisme vers l’avenir malgré l’expérience d’un passé mouvementé et d’un présent ténébreux;
  • En continuant à échafauder des projets dont certains peuvent paraitre chimériques pour ceux qui ne croient plus en une autre Haiti;
  • En entreprenant des démarches positives avec, bien sûr, un degré de grands sacrifices au nom de Jean-Jacques-Dessalines, de Capois-la-Mort, d’Henri Christophe, ces preux qui ont fait 1804, et surtout au nom des futures générations;
  • En prenant cet élan hautement patriotique qui mettrait fin à nos sempiternelles querelles de chapelle et au subversif tribalisme politique qui poussent les autres à questionner notre capacité à nous gouverner nous-mêmes;
  • En se mettant à l’écoute des uns et des autres sans l’arbitrage de l’étranger;
  • En protégeant les démunis et les plus vulnérables de la société.
  • Bref, en relevant les défis de deux dernières décades et ceux à venir.

Osons « Espérer contre toute Espérance! »

Ce sont là nos souhaits pour l’année 2020 et cette nouvelle décade.

  1. Des souhaits formulés à l’endroit de tous nos compatriotes:
    Ceux qui ont réussi et ceux qui peinent quotidiennenent.

    Que les projets qui leur tiennent à coeur se réalisent. Qu’ils aient surtout la satisfaction de goûter à un début de changement positif dans le pays.
  2. Des souhaits adressés à nos politiciens de toutes affiliations:
    Ceux qui détiennent encore les rênes du pouvoir et ceux qui s’activent pour les renvoyer.

    Qu’ils aient un changement de coeur capable de déboucher sur de nouvelles et positives stratégies, pour une relance du bon renom du pays et de ses citoyens!
    Qu’ils apprennent donc à se mettre ensemble pour finalement rebatir un pays moderne et respecté!
  3. Des souhaits  envoyés aux chefs religieux de toutes confessions:
    Qu’ils appartiennent au catholicisme, aux cultes réformés et au vodou.

    Que leur foi et leur engagement se traduisent publiquement par leur collégialité, leur sens du devoir, le respect des autres confessions et leur proximité avec le peuple dont ils sont à la fois le guide et le serviteur!
  4. Des souhaits adressés également à nos collaborateurs.
    Qu’ils continuent à porter bien haut le nom d’Haiti et, à leur façon, projeter une meilleure image d’elle!

Aux visiteurs qui nous sont arrivés de tous les continents, à ceux et celles qui prennent quelquefois la peine de nous écrire, nous faisons, avec de profondes gratitudes, nos voeux les plus cordiaux pour une année prospère.

Quant à nous, nous continuerons à croire dans la capacité de résistance de notre peuple, dans son esprit d’initiative et d’innovation, malgré ses nombreuses et déconcertantes chicaneries.

A tous et à toutes,
Une Bonne Année 2020

Haiti-Référence
Lundi 30 décembre 2019