« Aimer hardiment »: Nos vœux pour l’année 2019

L’année 2018 touche à sa fin. Et, à quelques jours du Nouvel An, c’est une tradition pour nous, administrateurs et rédacteurs d’Haïti-Référence de prendre un moment pour remercier nos collaborateurs, les fidèles visiteurs du site, mais aussi présenter nos vœux à tous nos compatriotes de toutes tendances politiques, de toutes affiliations religieuses et éparpillés sur tous les continents.

Laissez-nous d’abord souhaiter à tous ceux et celles qui liront ces lignes, de quelque nationalité qu’ils soient, et à nos compatriotes de toutes les latitudes une fructueuse année 2019.

Une année qui, nous l’espérons de tout cœur, nous incitera à regarder avec EMPATHIE, TOLÉRANCE et RESPECT nos voisins, nos collègues de travail, les membres de notre famille et tous ceux et celles qui croiseront notre chemin, et à aimer si possible, beaucoup plus hardiment qu’avant.

Des vœux au contour virtuel mais pleinement réalisables si, malgré tout ce que nous avons entendu, observé et probablement vécu, nous refusons de fermer les yeux sur la bonté du monde que certains veulent nous faire voir à travers un prisme déformant, si malgré les propos désobligeants d’un président d’une puissance, nous arrivons à découvrir la grande capacité d’amour de l’humain et surtout à valoriser le potentiel de nos compatriotes, ce potentiel que nos intrépides pères fondateurs (Dessalines, Christophe, Capois-la-mort) avaient perçu dans les anciens esclaves devenus intrépides soldats quoique va-nu-pieds.

Nous sommes bien conscients que l’année qui s’achève n’a pas été tendre envers la majorité de nos compatriotes vivant en Haïti ou résidant ailleurs.

En Haïti, d’un côté, la grande majorité a vu son pouvoir d’achat diminuer, une réalité qui avait d’ailleurs motivé sa grande colère après l’annonce de la hausse considérable du prix du carburant du début de mois de juillet. Elle doit également à tout moment faire preuve de prudence devant l’insécurité et la violence généralisées sans parler de l’insécurité alimentaire aiguë à laquelle font face quotidiennement des millions. De l’autre côté, une petite minorité continue à s’enrichir scandaleusement et déambule sous bonne garde.

Dans la diaspora, certains de nos compatriotes se sont retrouvés et se retrouveront dans une situation très précaire. C’est le cas, par exemple de ceux vivant au Chili, pays qui ne répond pas à leur idée de l’El Dorado; en République Dominicaine où ils sont assimilés à des envahisseurs et où un énergumène eut même l’audace de proposer que le droit de prendre les moyens de transport public leur soit même refusé; aux États-Unis où ceux détenant le Statut de Protection Temporaire (TPS) ou protégés par le Deferred Action for Children Arrival communément appelé DACA vivent avec cette épée de Damoclès placée par un Denys des temps modernes sur leurs têtes; au Mexique ou quelques milliers des nôtres qui voulaient émigrer vers le grand nord ont vu leur plan détruit ou presque; et même au Canada où beaucoup de compatriotes ont été frappés d’expulsion, certains se retrouvant, en cette veille de nouvel an, simplement en sursis à cause de la vague de violence qui secoue Haïti ce dernier trimestre de l’année.

Il serait vraiment difficile pour ceux vivant ces situations d’aimer beaucoup plus hardiment qu’avant, et de voir le monde autrement que comme une agglomération déformée et injuste qui les identifie souvent à des porteurs de toutes les misères. Ces compatriotes sont d’ailleurs bien conscients que, par la précarité de leur condition, en Haiti ou ailleurs, ils inspirent aux autres, tour à tour, l’ennui, le dégoût, l’agacement, et quelquefois la colère.

Nos vœux sont pourtant sincères et réalistes, parce qu’en fait, traduits en actes, ils permettront d’abord à ceux et celles en position d’autorité ou qui nous servent de modèles de sortir de leurs bornes. Par exemple:

  1. À ceux qui sont continuellement à l’affût du changement de se munir finalement d’un plan bien déterminé qui tienne compte de l’intérêt du plus grand nombre, et une feuille de route pragmatique pour le post-changement;
  2. À nos politiciens qui détiennent aujourd’hui les rênes du pouvoir de comprendre la valeur de l’authentique dialogue inter-haïtien et d’éviter les formes scabreuses dans leurs démarches, les tentatives de négociations et les décisions scandaleuses;
  3. Aux journalistes de tenir bien à cœur la déontologie de leur noble profession et d’éviter les actions qui mettraient en danger la sécurité de nos compatriotes;
  4. Aux élites de parvenir à comprendre que le mécontentement à leur égard est largement répandu, et pour cause, et qu’elles doivent choisir d’investir dans le peuple au lieu de le diviser, de l’armer et de l’inciter à s’entre-tuer. Qu’elles apprennent à de cheminer avec lui pour rétablir sa confiance.
  5. Aux chefs religieux de maintenir ce niveau de haute moralité et de dépassement qui feront d’eux de vrais pasteurs, tout en restant au dessus des querelles de chapelle.
  6. Aux membres des gangs de comprendre tout le mal qu’ils causent dans la société par leur non-respect de la vie des autres. Qu’ils comprennent surtout qu’ils finiront par être eux-mêmes les victimes de l’insécurité qu’ils ont alimentés et ce, sans susciter de sympathie;
  7. Et ensuite à ceux et celles aux conditions humbles ou simplement décentes d’arriver à reprendre leur avenir en main, de retrouver cette confiance en soi et d’avoir la détermination de prendre une voie qui leur permettra de soutenir le regard de l’autre, de l’obliger à voir leur potentiel sans toutefois s’en abuser et, s’ils doivent recevoir son aide, de s’assurer qu’elle est offerte dans le respect et sans condescendance.

Des vœux réalistes mais qui demanderont de grands efforts de la part des uns et des autres et des élans d’altruisme; démarches plus que jamais nécessaires car elles peuvent désamorcer la colère et même la violence, restaurer les éléments de civilité (politesse, courtoisie, bienséance et honnêteté) dans nos interactions personnelles et dans la société. « Aimer hardiment » a le pouvoir de changer profondément nos relations avec les autres et avec nous-mêmes. Et cela peut changer notre monde pour le meilleur.

Donc, une bien meilleure année 2019 à tous et à toutes.

Et que Dieu protège Haïti, héritage sacré de nos ancêtres dont le sang, les sacrifices ont rendu possible le rassemblement du premier janvier 1804 aux Gonaïves.

Haiti-Référence
Mercredi 26 décembre 2018