Conférence Des Pasteurs Haitiens (COPAH): Lettre ouverte au premier ministre, Ariel Henry

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Texte reçu le mardi 13 février 2024

Port-au-Prince, le 11 février 2024

Cher Monsieur Henry,

Nous, dirigeants de la Conférence des Pasteurs Haïtiens (COPAH), vous adressons cette lettre ouverte pour vous rappeler que votre mission à la tête du gouvernement de facto a pris fin depuis le 7 février 2024, date à laquelle vous auriez dû transmettre pacifiquement le pouvoir à des dirigeants légitimes élus par le peuple à travers des élections, conformément à l’article 20 d’un prétendu accord conclu avec vos comparses le 21 décembre 2022. Bien que cet accord ne vous ait véritablement conféré aucune légitimité pour être à la tête du pays en tant que Premier ministre, vous et vos tuteurs internationaux l’avez toujours évoqué pour justifier votre présence au poste de Premier ministre de facto depuis près de trois ans.

Maintenant que cet accord soi-disant est caduc, plus rien ne justifie que vous soyez toujours à la Primature, prétendant être le chef du gouvernement. Par conséquent, vous n’avez plus le droit de poser aucun acte engageant l’État haïtien ni de parler au nom du peuple qui ne vous a jamais mandaté ni reconnu votre autorité.

Inutile de réclamer votre démission puisque vous n’avez plus de mission à accomplir à la tête du pays. Vous devez être chassé. Votre nouveau coup d’Etat cautionné par les forces du mal n’a aucune chance de réussir.

Nous voulons vous aviser qu’en vous obstinant à vous accrocher au pouvoir, vous vous placez dans une position extrêmement délicate en continuant d’occuper la Primature de manière inconstitutionnelle, sans titre ni qualité, contre la volonté populaire exprimée maintes fois clairement à travers des manifestations de rue, qui se sont intensifiées ces dernières semaines.

Même en accord avec le Core Group qui exerce la fonction présidentielle en Haïti, les gangs armés qui ont carte blanche pour terroriser la population, et une partie du secteur d’affaires et de l’Église, il ne vous est pas recommandé de continuer à usurper le titre de Premier ministre. En plus d’être un prédateur des droits humains, vous êtes devenu aujourd’hui un dangereux imposteur, condamné à exercer une dictature délirante pour tenter de vous maintenir au pouvoir illégalement. Votre comportement et celui de vos alliés menacent dangereusement la paix, la stabilité, la sécurité et le progrès d’Haïti.

Monsieur Henry, nous constatons avec peine que depuis près de trois ans, au lieu de chercher un consensus national pour sortir le pays de l’impasse et mettre fin aux calamités et détresses du peuple haïtien, vous vous êtes contenté de vous servir du soutien du Core Group, de l’oligarchie et des gangs pour instaurer une terreur d’État afin d’empêcher les masses appauvries des bidonvilles et de la paysannerie d’exprimer leur colère contre l’inertie, l’incompétence et la corruption qui caractérisent votre gouvernement. Vous vous êtes servi du soutien international, des gangs criminels et de l’oligarchie pour réprimer dans le sang toutes manifestations antigouvernementales. En plus de l’utilisation des gangs criminels entretenant la terreur dans le pays, votre gouvernement a instrumentalisé la police nationale, transformée en milice politique pour mater tout mouvement de revendications populaires.

Monsieur Henry, dans une adresse à la nation diffusée fort tard dans la nuit du 7 au 8 février 2024, vous avez réitéré votre volonté de continuer à vous accrocher au pouvoir avec le soutien des mêmes secteurs susmentionnés jusqu’à ce que vous rétablissiez la sécurité dans le pays et organisiez des élections; ce que vous n’avez pas fait depuis bientôt trois ans. Votre discours, qui n’a rien de nouveau et ne laisse entrevoir aucune sortie de crise dans l’immédiat, reprend fidèlement les mêmes inepties de certains diplomates irrespectueux de l’article 41 de la convention de Vienne. Et cela ne nous a pas étonnés. Cependant, nous craignons fortement que vous vous trompiez en pensant qu’avec le soutien du Core Group, de l’oligarchie haïtienne et des gangs armés, vous pourrez continuer à assujettir le peuple haïtien pendant longtemps par la force et la violence criminelle pour vous maintenir au pouvoir et anéantir le rêve démocratique du peuple haïtien qui aspire à vivre libre et souverain.

L’histoire d’Haïti est pleine d’enseignements concernant tous ceux qui, comme vous, ont fait ce choix insidieux, se sont toujours cassé les dents sur la résistance du vaillant peuple haïtien. La violence criminelle et les promesses farfelues ne triompheront jamais de la conviction et de la détermination d’un peuple qui aspire à la démocratie, à la justice sociale et à la dignité.

Monsieur Henry, au soir de votre âge et en tant que professionnel accompli, vous n’avez plus rien à perdre ni à espérer. Tout ce que vous faites, que ce soit sur le plan professionnel ou dans la vie en général, représente juste un surplus. C’est pourquoi nous estimons utile de souligner à votre attention la nécessité de faire preuve de sagesse et de raison dans ce contexte historique particulièrement difficile et troublé sans que vous n’ayez à causer encore plus de peine à notre pays. Cela peut se faire sans heurts ni cassés, sachant qu’il est indispensable d’éviter de précipiter le pays dans une guerre civile, dont vos alliés et vous porterez l’entière responsabilité.

Recevez monsieur Ariel Henry, nos salutations patriotiques!

Pour la Conférence des Pasteurs Haïtiens (COPAH),

Rév. Pasteur Dorvila Normil
Président

Rév. Pasteur Ismaël Baptiste
Secrétaire Exécutif