Textes et Documents » Dany Laferrière

📂 Discours de réception de Dany Laferrière à l’Académie française le 28 mai 2015

Mesdames et Messieurs de l’Académie,

dany-laferriere-academiePermettez que je vous relate mon unique rencontre avec Hector Bianciotti, celui auquel je succède au fauteuil numéro 2 de l’Académie française. D’abord une longue digression – il y en aura d’autres durant ce discours en forme de récit, mais ne vous inquiétez pas trop de cette vieille ruse de conteur, on se retrouvera à chaque clairière. C’est Legba qui m’a permis de retracer Hector Bianciotti disparu sous nos yeux ahuris durant l’été 2012. Legba, ce dieu du panthéon vaudou dont on voit la silhouette dans la plupart de mes romans. Sur l’épée que je porte aujourd’hui il est présent par son Vèvè, un dessin qui lui est associé. Ce Legba permet à un mortel de passer du monde visible au monde invisible, puis de revenir au monde visible. C’est donc le dieu des écrivains.

Ce 12 décembre 2013 j’ai voulu être en Haïti, sur cette terre blessée, pour apprendre la nouvelle de mon élection à la plus prestigieuse institution littéraire du monde. J’ai voulu être dans ce pays où après une effroyable guerre coloniale on a mis la France esclavagiste d’alors à la porte tout en gardant sa langue. Ces guerriers n’avaient rien contre une langue qui parlait parfois de révolution, souvent de liberté. Ce jour-là un homme croisé à Port-au-Prince, peut-être Legba, m’a questionné au sujet de l’immortalité des académiciens. (suite…)

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📂 L’Énigme de la grenade

Je suis à Bordeaux(1), la prison. Dans le petit local qui me sert de studio temporaire depuis 4 ans, j’accueille ce matin douze Souverains dont dix sont noirs. Tous dans la vingtaine. Certains sont nés au Québec et d’autres sont arrivés très jeunes d’Haïti. Je sais d’avance que ceux-là se sentiront particulièrement plus visés par la nouvelle que je m’apprête à annoncer. Mais je ne voudrais pas l’annoncer n’importe comment. Pas comme dans les nouvelles.Et encore moins comme certains chroniqueurs l’ont accueilli, c’est à dire avec grande joie, sans plus. J’aimerais que mes Souverains retrouvent dans cette nouvelle plus qu’une simple fierté folklorique face à la réussite d’un homme. Un homme qu’ils perçoivent comme un des leurs. (suite…)

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